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Quelle finalité pour l’école ?

À propos d’un rapport de France Stratégie

mardi 10 janvier 2017, par Jean-Pierre Terrail

Le rapport de France Stratégie publié en septembre 2016 et intitulé « Quelle finalité pour l’école ? » mérite attention et réflexion à un double titre. D’une part en ce que la question à laquelle il entend répondre, celle des objectifs de la scolarisation, est aussi primordiale que rarement soulevée dans le débat public, au point qu’il faille à chaque fois décrypter la représentation implicite des missions de l’école qui sous-tend chaque intervention dans ce débat, et chaque mesure de politique scolaire. C’est aussi le statut de l’institution signataire qui appelle l’attention sur ce rapport : héritière de l’ancien Commissariat au Plan, France Stratégie est créée en 2013, et se définit comme « un organisme de réflexion, d’expertise et de concertation placé auprès du Premier ministre (…), outil de pilotage stratégique au service de l’exécutif (qui prend appui) sur des équipes d’analystes confirmés compétents ».

Rappelons, avant de les mettre en discussion, les termes du rapport [1].

La démarche des experts de France Stratégie

Après avoir souligné, à très juste titre donc, que le débat sur les missions de l’école est à la fois nécessaire et occulté, le rapport est organisé en trois moments.

France Stratégie observe d’abord que l’institution scolaire oriente aujourd’hui « l’essentiel de son énergie dans une direction : garantir l’uniformité du système en sorte que chaque élève bénéficie autant que possible de la même expérience scolaire ». Notre système éducatif donne autrement dit la priorité à la sélection méritocratique des élites, installant de ce fait « les professeurs dans une posture d’évaluation neutre des capacités des élèves plutôt que d’accompagnement en vue de la progression de chaque enfant ». D’autres finalités, note le rapport, sont pourtant possibles.

Pour définir ces dernières, et examiner leurs implications, les experts procèdent dans un second temps à l’élaboration de trois « idéaltypes ».

* Le premier modèle d’organisation alternative est celui d’une école qui se préoccuperait exclusivement de « la préparation au monde professionnel ». Les contenus d’enseignement en seraient élaborés « notamment par les acteurs du monde socioéconomique » ; le dispositif national serait fortement décentralisé afin de l’adapter aux ressources locales du marché du travail et permettrait l’enseignement alterné ; les élèves se spécialiseraient progressivement jusqu’à développer un profil de compétences personnel, et bénéficieraient d’une formation tout au long de la vie ; les enseignants seraient capables de gérer des partenariats multiples.

* Le second modèle est celui de « l’accomplissement de la personnalité de chaque élève ». Le respect de leur singularité individuelle, l’élaboration conséquente d’un projet personnel épanouissant déterminent un besoin de savoirs spécifiques, et donc un système scolaire sans programmes nationaux et une autonomie totale des établissements, le principe d’une évaluation nationale étant cependant maintenu.

* Le troisième modèle est celui de « la transmission d’une culture commune », d’une école dispensant à tous les mêmes savoirs jugés essentiels à la formation de citoyens éclairés : débarrassée donc des contraintes de la sélection méritocratique, et se dotant d’équipes pédagogiques autonomes attachées à assurer l’adéquation des moyens à des publics inévitablement hétérogènes. Cet objectif suscite un fort besoin de motivation des élèves (qui n’ont pas choisi les apprentissages à réaliser), et donc de « sources de motivation extrinsèque » tels des examens nationaux de fin de cycle.

Dans un troisième temps, les experts de France Stratégie procèdent à la comparaison de ces trois modèles, qui les amène à deux conclusions.

Ils relèvent d’abord la convergence des trois modèles quant à « l’autonomie forte » à accorder aux équipes pédagogiques et aux établissements aux plans juridique, financier, pédagogique : s’il n’y a plus de mise en concurrence des élèves visant à leur sélection méritocratique, l’uniformité du mode d’enseignement ne s’impose plus.

Ils soulignent en même temps la disparité de ces modèles quant au mode de détermination des contenus, lequel est relatif à la définition des missions de l’école. Il ne leur paraît pourtant pas impossible de concilier les trois modèles en affectant leur finalité propre à des temps différents du processus éducatif, et évoquent deux formes possibles d’une telle conciliation. Dans la première, l’école primaire serait affectée à la transmission d’une culture commune, le collège assurerait l’épanouissement de chaque élève, le lycée se chargeant de la préparation au monde professionnel. Dans une seconde hypothèse, la transmission d’une culture commune serait l’objet d’un tronc commun traversant l’ensemble du cursus ; le reste du temps scolaire disponible serait consacré à l’épanouissement individuel, et prendrait de plus en plus en charge, au long de l’avancée du parcours, les objectifs de la formation professionnelle.

Quelle est la finalité du rapport de France Stratégie ?

Nous déplorions, en conclusion d’une étude sur l’imposition des EPI, que la question : « quelle école voulons-nous ? », logiquement préalable à toute débat un peu sensé sur la réforme du collège, ne soit jamais posée, comme si elle était soigneusement écartée [2]. France Stratégie l’a prise à bras le corps, et l’on ne peut que s’en réjouir. Tout comme on se réjouira de voir souligné, ce qui était jusque-là aussi surtout le fait du GRDS, le rôle de principe organisateur de l’ensemble du système éducatif que joue, dans le cas de l’« école unique » mise en place par la Cinquième République, la mise en concurrence des élèves [3]. Et l’on reconnaîtra encore aux auteurs du rapport le mérite d’avoir identifié de façon plutôt convaincante les trois grandes alternatives à ce principe, telles qu’elles hantent aujourd’hui le débat public : en y incluant notamment la visée de la transmission d’une culture commune, dont se réclame la FSU, et que le GRDS défend pour sa part de façon affirmée et systématique.

L’on ne saurait pour autant s’en tenir là. Sous le couvert d’un état des lieux exhaustif et d’une réflexion sur les conséquences que l’on peut en déduire en toute objectivité, le rapport de France Stratégie laisse en effet entrevoir un plaidoyer pour le caractère inéluctable de la régulation du système éducatif par le marché qui n’apparaît pas vraiment justifié par l’argumentation proposée. Pour les auteurs, « là où l’objectif de sélection méritocratique des élites impliquait d’enseigner de manière uniforme (…) les trois finalités visées par les modèles alternatifs (…) n’imposent pas cette uniformité du mode d’enseignement » (p. 16). Autrement dit : la mise en cause de l’actuel système éducatif et de son principe organisateur, la réalisation de l’égalité des chances pour la sélection des meilleurs, est légitime au vu de la médiocrité de leurs résultats, mais elle débouche nécessairement sur l’éclatement et la dispersion des lieux et des modalités d’enseignement. Toutes les alternatives envisageables, en effet, requièrent une « autonomie forte des équipes pédagogiques et des établissements », seul moyen de leur permettre les indispensables adaptations au public et au contexte local. L’argumentation qui conduit à cette conclusion mérite donc d’être examinée de près : l’amélioration de l’efficacité éducative de l’école française devrait-elle se payer du renoncement à un grand service public d’éducation nationale assurant l’homogénéité de la socialisation scolaire sur l’ensemble du territoire ?

Un problème de méthode

La démarche des auteurs du rapport est la suivante : le fonctionnement actuel de notre système éducatif, qui met tous les élèves en concurrence de façon à sélectionner les meilleurs, donne à l’expérience des résultats trop médiocres. Il convient donc de considérer les façons possibles de le réorganiser en lui assignant d’autres finalités que la sélection méritocratique. Et le rapport de noter à cet égard : « Nous avons choisi de mener cette réflexion en imaginant pour chaque finalité un modèle idéaltypique d’École » (p. 53). Cette procédure prospective relativement originale mérite un examen d’autant plus attentif que France Stratégie envisage de la mettre en œuvre dans d’autres domaines [4].

L’affichage de la démarche est clairement celui de la neutralité : loin de plaider pour telle ou telle option qui leur paraîtraient éthiquement ou politiquement préférable, les auteurs nous proposent d’examiner avec eux les choix envisageables, d’en peser les avantages et inconvénients respectifs, d’en réfléchir les compatibilités éventuelles. Ils semblent ainsi s’effacer derrière le principe de réalité : voilà les cartes qui peuvent être jouées, aux citoyens et au politique de trancher.

De réalité, pourtant, il est ici bien peu question. La chose s’avère dès le constat qui sert de départ à l’argumentation, celui des limites rencontrées par l’école de l’égalité des chances. Les auteurs reprennent à cet égard le mot d’Antoine Prost : notre système éducatif a démocratisé la sélection, il n’a pas démocratisé la réussite. Ils observent que toutes les mesures de lutte contre l’échec ont été incapables d’adapter le secondaire « à des publics socialement et scolairement très hétérogènes ». Quant à tirer les leçons de l’expérience, à identifier les obstacles sur lesquels la démocratisation a buté, l’analyse tourne court, se contentant d’incriminer l’abandon de la formule des cours complémentaires, qui assuraient aux élèves des enseignants moins nombreux et plus présents. On dispose pourtant aujourd’hui de résultats de recherche accumulés depuis un bon demi-siècle autrement plus riches et plus convaincants [5].

L’indifférence à l’égard des enseignements de l’expérience marque tout aussi bien l’élaboration des alternatives proposées à l’examen. On sait pourtant que les politiques de transformation sociale, s’agirait-il des plus révolutionnaires, ne sauraient faire table rase du passé. Le mort saisit toujours le vif, au moins pour partie. Certes le cours historique du monde ne détermine l’avenir en aucun de ses moments : mais il définit le champ des possibles à l’intérieur duquel l’action politique peut s’inscrire. Et celle-ci a le plus grand intérêt à s’instruire de l’expérience passée, sauf à reproduire les errements auxquels elle souhaite échapper.

En donnant comme des « idéaltypes » les modèles d’école qu’ils déduisent des trois finalités alternatives envisageables, les auteurs du rapport font implicitement référence à la démarche de Max Weber, formalisée dans les Essais sur la théorie de la science et mise en œuvre avec brio, notamment, dans son fameux Protestantisme et capitalisme. Mais l’allusion est trompeuse. Pour le sociologue allemand, l’idéaltype est bien une utopie, au sens littéral du terme – ce n’est pas une restitution fidèle de la réalité – mais il est élaboré à partir de l’observation de la réalité, dont on repère les caractéristiques distinctives qu’on typifie et qu’on relie entre elles : « On obtient un idéaltype en accentuant unilatéralement un ou plusieurs points de vue et en enchaînant une multitude de phénomènes donnés isolément, diffus et discrets, que l’on trouve tantôt en grand nombre, tantôt en petit nombre et par endroits pas du tout, qu’on ordonne selon les précédents points de vue unilatéralement, pour former un tableau de pensée homogène. On ne trouvera nulle part empiriquement un pareil tableau dans sa pureté conceptuelle : il est une utopie [6]. » Or les modèles d’école décrits par les experts de France Stratégie ne sont pas élaborés en partant de réalités observées et analysées. Ils sont juste déduits spéculativement du principe fondateur, en posant à chaque fois la question : quels seraient les traits pertinents d’un système scolaire doté de telle finalité ? Ces modèles sont eux aussi des utopies, mais dont la conception ne s’embarrasse pas des leçons de l’expérience. Ce qui n’est pas sans conséquences sur la crédibilité de considérations du rapport parmi les plus cruciales.

Ce que nous apprend l’expérience

L’école au service du marché (modèle A)

* Une osmose du monde scolaire et du monde professionnel

L’école du modèle A est organisée par le principe de la préparation des élèves au monde professionnel, qui exige une étroite collaboration entre le monde professionnel et le monde scolaire, permettant de définir les compétences dont le marché a besoin. Cette collaboration régit la totalité du parcours scolaire, et au-delà assure la continuité entre formation initiale et formation continue tout au long de la vie.

L’enseignement primaire est centré sur l’apprentissage des « enseignements transversaux » (bases de la culture écrite, à transmettre par les méthodes actives). Ces enseignements transversaux occupent une place minoritaire et décroissante dans le second cycle, prioritairement consacré à la professionnalisation et à l’alternance (2 années de stage sur 7 au total) : d’abord sous forme de modules de préprofessionnalisation familiarisant les élèves avec les six grands champs de l’activité professionnelle ; les élèves se spécialisant ensuite (à l’entrée au lycée) par le choix d’une majeure et d’une mineure parmi ces derniers. L’enseignement supérieur assure la formation des adultes tout au long de la vie et prépare pour sa part directement aux métiers. L’accumulation des crédits obtenus en 2ème cycle, puis en formation continue et par validation des acquis de l’expérience définit les compétences de l’intéressé et gère une carrière qui ainsi ne s’enferme pas nécessairement dans les acquis initiaux et les positions subalternes.

* Concurrence et inégalités sociales

Admettons, c’est la règle du jeu idéaltypique que nous propose France Stratégie, l’idée d’une école complètement envahie par l’utilitarisme économique, et négligeant le constat historique récurrent selon lequel aucune société humaine n’a jamais renoncé à sa part de culture libre, où la pensée s’exerce pour le seul plaisir de la réflexion, du jeu, de la connaissance gratuite et de la recherche esthétique. Reste une question : ce premier modèle, qui se veut comme les autres une alternative au système actuel, répond-il vraiment à cette intention ? Certes, il se différencie significativement de l’existant en poussant à son terme la logique actuellement à l’œuvre qui voit les besoins de l’entreprise et l’état du marché du travail peser de façon croissante sur la détermination des contenus et des parcours scolaires. Mais rompt-il pour autant avec le principe dont la critique étaye toute l’argumentation du rapport, celui de la mise en concurrence des élèves dans une école qui assure l’égalité de la sélection bien mieux que celle de la réussite, pour reprendre la formule d’A. Prost ? C’est peu crédible.

L’école « de la préparation au monde professionnel » réduit chaque étape de la scolarité à un pas de plus vers l’accès direct au métier, au moins à partir de l’entrée dans le secondaire. Comment le parcours scolaire pourrait-il, dans ces conditions, ne pas faire l’objet d’un affrontement plus vif encore qu’aujourd’hui entre les familles, les élèves, les milieux sociaux ? Son organisation s’y prête : dès 15/16 ans, les élèves sont invités à choisir « librement » les champs professionnels qu’ils souhaitent investir puis au sein de ces champs le métier qu’ils souhaitent exercer. Or l’expérience montre à l’envi que les décisions qui sont laissées à la libre appréciation des familles et des jeunes constituent des moments clé dans le jeu de la concurrence. Elles renforcent toujours le « libre » exercice des déterminismes sociaux, grâce au jeu combiné d’ambitions mesurées à la position sociale et d’une connaissance très inégale des choix les plus rentables.

Qui plus est on voit mal comment les acquis des élèves en matière de « savoirs transversaux » pourraient ne pas peser dans les orientations professionnelles : or rien ne s’oppose, dans le modèle A, à la perpétuation des inégalités scolaires qu’on peut observer aujourd’hui à la sortie du primaire et dont on sait le caractère décisif pour toute la suite de la scolarité.

On ne saurait au total exclure que l’école « de la préparation au monde professionnel » soit plus soumise encore que notre actuel système éducatif à la concurrence et aux inégalités sociales. Il n’est même pas sûr qu’elle satisferait le patronat, conscient sans doute de la nécessité de trouver sur le marché du travail des titulaires de savoirs disciplinaires de haut niveau dont les experts de France Stratégie ne semblent pas avoir prévu la formation (laquelle est incompatible avec l’étiolement rapide de la part des « enseignements transversaux).

L’école de l’accomplissement personnel (modèle B)

* L’élaboration d’un « curriculum-projet »

Examinons alors le modèle B, conçu pour permettre « l’accomplissement de la personnalité de chaque élève ». Il semble aller de soi, pour les auteurs du rapport, qu’un tel objectif ne peut être atteint que si les contenus de savoir à transmettre ne sont déterminés ni par les besoins du marché ni par l’exigence d’appropriation d’une culture commune, mais régis en leur entièreté par la personnalité singulière de chaque élève. Il s’agit ici de s’en tenir à « une définition par le bas de ce que les élèves doivent apprendre » (p. 76).

Cette exigence soulève des difficultés de trois ordres. Est-il réaliste de concevoir un système éducatif laissant « place à une diversité potentiellement infinie de parcours ? » Prudents, les auteurs admettent la nécessité sur ce plan d’un compromis entre le souhaitable et le possible.

Second obstacle : « il serait naïf d’imaginer que tous les élèves soient à tout âge en mesure de concevoir par eux-mêmes les projets qu’ils souhaitent réaliser » (p.77). Il faudra les y aider, en procédant à cette fin en trois temps : en leur soumettant d’abord un « éventail » de projets de vie à partir de ce qu’ils sont en mesure d’exprimer de leurs aspirations ; puis, une fois leur choix progressivement construit, en déterminant pour eux le « curriculum-projet », la liste des savoirs nécessaires à sa réalisation ; enfin en organisant la transmission de ces savoirs avec « exigence et bienveillance ».

Troisième difficulté : la « libre » expression des projets de vie ne sera-t-elle pas régulée en fait par le milieu social des élèves ? Les auteurs du rapport qui ne s’étaient pas posé la question dans le cas du modèle A se la posent cette fois-ci, et conviennent que la probabilité qu’il en aille bien ainsi est forte et inévitable. La seule solution à leurs yeux consiste à « considérer autrement l’objectif d’égalité », celui-ci étant supposé atteint dès lors que chaque élève dispose effectivement des « conditions spécifiques d’accomplissement personnel » (p.75).

* Discussion du modèle

Les experts de France Stratégie admettent la difficulté d’une auto-détermination précoce des projets de vie, mais n’interrogent pas les raisons d’un tel constat. L’auraient-ils fait qu’ils se seraient peut-être souvenu qu’on ne naît pas homme, mais qu’on le devient en s’appropriant le patrimoine linguistique et culturel existant, en faisant sien cet ensemble historiquement constitué de savoirs et croyances, compétences et savoir-faire qui nous rend proprement humains. « Ce que tes pères t’ont légué, passe ta vie à l’acquérir » (Freud). Or chacun, à partir des potentialités biologiques communes de l’espèce, devient humain à sa façon : il n’est pas deux façons identiques de devenir une personne en captant l’héritage partagé. La singularité de chaque individu humain n’est pas un donné originaire, mais le résultat d’un parcours d’appropriation du patrimoine commun qui est toujours unique. C’est lorsque ce parcours est suffisamment avancé que s’ouvre progressivement la possibilité d’un projet de vie effectivement personnel.

À cette première raison, de portée universelle, le monde actuel en conjoint une seconde, qui tient aux profondes modifications du champ des possibles qui s’opèrent de génération en génération, et donc entre la naissance et l’entrée dans la vie d’adulte. On ne sait pas, enfant, ce que sera le monde demain : comment dès lors anticiper si tôt la route que l’on s’y tracera ?

Associer l’accomplissement personnel à une auto-détermination précoce du projet de vie apparaît donc comme un non-sens anthropologique. Et imaginer un système scolaire fondé sur cette auto-détermination est pure vue de l’esprit. Si l’élaboration d’un projet propre et le développement de l’activité visant à le réaliser sont bien, en effet, des modalités essentielles de l’accomplissement personnel, la seule façon que peut avoir l’école de contribuer à ce dernier consiste à en créer les conditions primordiales en organisant l’appropriation effective du patrimoine commun par tous les membres des jeunes générations.

Le modèle B laisse supposer, parallèlement, la possibilité d’une société dont chaque membre aurait suivi un parcours exclusif, la possibilité d’une société composée d’individus juxtaposés, sans culture partagée. Cette vision dérivée de l’individualisme radical des économistes néo-classiques est elle aussi profondément irréaliste : on ne fait pas société sans culture commune, et aucune vie sociale n’est concevable si la socialisation primaire de ses protagonistes n’est pas centrée sur la transmission de cette culture commune.

La pertinence du modèle achève de se dissoudre si l’on prend en considération la troisième difficulté de sa mise en œuvre telle que la signalent les auteurs eux-mêmes. Les jeunes élèves n’ont pas de projet de vie vraiment personnel et les amener à se prononcer à ce sujet ne peut les conduire qu’à reprendre à leur compte les aspirations propres à leur milieu social. Une école conforme à ce modèle ne saurait être en ce sens qu’une école de la reproduction sociale. Qu’à cela ne tienne, argumentent en quelque sorte les auteurs, on la dira quand même école de l’égalité, sinon de l’égalité des réussites, du moins de l’égalité dans l’accomplissement personnel de chacun. Cette pirouette vaut ce que valent tous les tours de passe-passe qui substituent pareillement une supposition d’équité (prudemment le mot n’est pas prononcé ici) à l’égalité réelle ; et les auteurs s’y contredisent. Au point de départ de leur réflexion ne fondaient-ils pas en effet leur critique de l’école actuelle sur le reproche d’avoir démocratisé non pas la réussite, mais seulement la sélection (en assurant de ce fait elle aussi une sorte d’équité, celle de l’égalité formelle devant la concurrence) ?

Faudrait-il, au bout du compte, puisque le modèle proposé manque tellement de consistance, abandonner toute perspective d’une école qui assurerait l’accomplissement personnel de ses publics ? C’est moins sans doute un tel objectif qu’il convient d’abandonner que le présupposé dont l’accompagnent les auteurs du rapport en le rendant solidaire d’une école où chacun, un peu à la manière préconisée autrefois par Yvan Illich, vient accomplir un parcours singulier et librement choisi. Encore faudrait-il à cette fin poser la question occultée ici : en quoi précisément l’accomplissement personnel exclut-il un curriculum au moins pour partie imposé, dès lors que ce curriculum comporte l’essentiel de ce qui est nécessaire pour participer pleinement à la vie sociale ?

Et l’école de la culture commune (modèle C) ?

* Les modèles A et B : des alternatives sans consistance

Les modèles A et B ne résistent pas à l’examen et ne sauraient être sérieusement considérés comme des hypothèses de travail crédibles. Les solutions qu’ils proposent ne seraient ni moins concurrentielles ni moins inégales socialement que celle qui exhibe aujourd’hui ses limites. Qui plus est, chacune à sa façon comporte une part d’irréalisme rédhibitoire.

Comment ne pas prendre en considération, si l’on veut sérieusement préparer au monde professionnel, qu’une part massive et toujours croissante des métiers – et leur obsolescence rapide – rend nécessaire pour l’immense majorité des élèves un haut niveau de formation scientifique, technologique, culturelle, ce qui interdit l’étiolement précoce de l’enseignement des dits « savoirs transversaux » ? Et concernant aussi le modèle A, s’il s’agit effectivement d’en finir avec la mise en concurrence des élèves, la seule solution ne consiste-t-elle pas à reporter la préparation au métier au-delà d’une zone de non concurrence qui devrait s’étendre, sachant le besoin d’une formation élevée pour tous, jusqu’à la fin du secondaire – cette zone de non concurrence étant évidemment consacrée à la transmission des savoirs, lesquels ont le grand avantage de se partager sans léser personne ?

Quant au modèle B, on a souligné combien la question de l’accomplissement personnel ne pouvait se poser qu’à des personnes ayant acquis une réelle conscience du monde et de leur propre singularité. L’on ne peut dès lors qu’abandonner la perspective des choix précoces de projets de vie – lesquels de toute façon réintroduisent concurrence et inégalités sociales – et se préoccuper d’assurer au moins aux élèves des apprentissages à la fois réussis et épanouissants, sachant que la majeure partie de ces derniers relèvera de l’incontournable appropriation d’une culture commune.

* Une scolarité épanouissante ?

Dans les représentations pédagogiques courantes l’épanouissement des élèves est une chose, l’acquisition des savoirs une autre, ces deux objectifs paraissant distincts si ce n’est contradictoire. On connaît ainsi les enquêtes menées auprès des maîtres du primaire qui demandent lequel de ces objectifs est à privilégier – une proportion croissante des enquêtés donnant d’ailleurs le primat à l’épanouissement des élèves [7].

Cette séparation entre les deux objectifs, et le primat donné à l’épanouissement sur les apprentissages, heurtent le bon sens et la moindre observation du comportement réel des élèves. Ceux-ci en effet sont massivement conscients que l’école est avant tout le lieu des apprentissages, et tout ratage de ces derniers, vécu comme un échec personnel, engage rapidement désintéressement, et à terme rejet de l’école et des savoirs : différents travaux de recherche rappellent que les comportements de rejet sont bien le fait des élèves qui sont passés à côté des apprentissages, que les enseignants qui privilégient le ludique perdent facilement leur ascendant moral sur les élèves, etc. Une scolarité épanouissante, si l’on préfère, a d’abord pour condition sine qua non des apprentissages efficaces.

* Des apprentissages efficaces ?

Là encore il convient de partir de l’expérience réelle pour identifier les conditions d’une meilleure efficacité des apprentissages.

La question de la « motivation » des élèves est au cœur de la réflexion sur la conduite des apprentissages depuis la rénovation pédagogique des années 1960/80. Elle est aussi extrêmement présente dans les considérations des experts de France Stratégie. Elle ne paraît pas soulever pour eux de grandes difficultés dans le contexte du modèle A, sans doute parce que celui-ci s’efforce d’assurer le libre choix des orientations professionnelles. Elle est encore moins problématique dans le cas du modèle B, tout entier organisé autour du libre choix des contenus d’enseignement par les élèves. Elle n’est soulevée par les rapporteurs que dans le cas du modèle C, celui qui vise à la transmission d’une culture commune et donc de contenus imposés a priori, et qui aurait dès lors à leur sens un fort besoin de « sources de motivation extrinsèques », tels des examens nationaux de fin de cycle. On voit bien, dans les trois cas, les linéaments de la pensée utilitariste ici à l’œuvre, qui suppose que les élèves n’ont d’autre souci que de maximiser leurs utilités personnelles, accèdent à l’acmé du bonheur si on les laisse agir librement en ce sens, et doivent être contraints quand ce n’est pas le cas.

Donc pour apprendre bien il faut être motivé, et pour être motivé la condition essentielle serait que l’apprentissage serve un but, permette de maximiser une utilité (ou d’écarter la menace d’examens ratés). Or, comme le fait observer Astolfi, la motivation ne saurait précéder l’apprentissage : on n’est pas motivé pour apprendre « en général », on est motivé par ce qu’on vous propose d’apprendre. La motivation ne doit donc pas être considérée comme un préalable mais comme « un effet attendu de la réussite pédagogique » [8]. Et la motivation dont les apprentissages scolaires ont besoin, ce n’est pas la motivation extrinsèque qui s’attache à leurs bénéfices attendus (réussir ses examens, son métier, sa vie), mais la motivation intrinsèque qui tient au plaisir de l’activité de connaissance considérée en elle-même. De fait, les recherches des années 1980/90 ont montré combien la réussite des apprentissages était fortement associée à l’attrait du savoir pour lui-même (lequel n’exclut évidemment pas la conscience des bénéfices d’un autre ordre que l’on peut en attendre), alors que les seules motivations extrinsèques s’avéraient peu opérantes [9]. En matière de « motivation », l’amélioration des apprentissages exige donc au premier chef non pas de référer les savoirs à un but extérieur librement choisi, mais de parvenir à faire goûter aux élèves « la saveur des savoirs ».

De ce point de vue on ne voit pas en quoi le modèle C, qui vise à transmettre à tous une culture commune, serait particulièrement mal armé pour motiver les élèves. Au contraire : débarrassé des contraintes de la mise en concurrence de ces derniers et ouvert aux dynamiques de l’apprendre et du comprendre ensemble, c’est le modèle le plus propice s’agissant de centrer l’investissement pédagogique sur les modalités les plus efficaces de conduite des apprentissages, et par là sur les conditions de préservation et d’impulsion de la motivation des élèves.

La question de la motivation est donc celle d’une bonne conduite des apprentissages. À cet égard l’expérience des dernières décennies nous apprend une autre chose, tout à fait cruciale. Il est vain d’attendre une meilleure réussite des élèves et un intérêt accru pour les savoirs de toutes actions visant à réduire la difficulté des apprentissages. Ce type de recette pédagogique paraît certes plus que jamais à l’ordre du jour – que l’on pense pour la seule année 2015-2016 aux projets de réforme de l’orthographe scolaire et du lexique numéral, et à l’imposition des EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires) dans les programmes du collège –, mais va à l’encontre d’une accumulation de constats de recherche sans appel. La preuve empirique est largement faite que le contournement de la difficulté intellectuelle n’apporte rien à personne, et contribue à couler les élèves les plus vulnérables. Ceux-ci ont besoin au contraire qu’on fasse crédit à leurs capacités de pensée réfléchie et qu’on n’en rabatte en rien, avec eux, sur l’ambition des contenus de savoir [10]. Seule une école de l’exigence intellectuelle paraît en ce sens de nature à répondre à la critique portée par France Stratégie quant au médiocre rendement de notre actuel système éducatif. Sous cet aspect là aussi le modèle C, visant à la transmission d’une culture commune, paraît le seul à même, en contrecarrant les effets ravageurs de la mise en concurrence des élèves, d’assurer une véritable rupture avec la logique d’une école de la reproduction des élites.

* La question de l’autonomie

Dans le modèle C, nous dit le rapport, « les enseignants ont une mission essentiellement pédagogique ». Celle-ci est particulièrement « complexe car il s’agit de transmettre les mêmes savoirs à tous les élèves » ; par conséquent de « mobiliser tous les outils et méthodes pédagogiques nécessaires » et à cette fin de « travailler en équipe ». La formation des enseignants adhérant à ces objectifs et capables de s’intégrer au travail d’équipe doit être repensée avec soin et « à l’échelle nationale ». Et, souligne encore le rapport, « un fort degré d’autonomie doit être accordé aux équipes pédagogiques » (pp. 103-105).

La cohérence de ces considérations ne manquera pas, jusque-là, de susciter l’adhésion. Mais pourquoi en déduire la nécessité de « l’autonomie des établissements », et s’en tenir à cette dernière en matière d’organisation du système éducatif ? D’autant que ladite autonomie est recommandée aux plans à la fois pédagogique, juridique et financier ! Les écoles devraient-elles être transformées en entreprises pour transmettre une culture commune ?

L’objectif exige d’évidence la généralisation de pratiques enseignantes s’adossant à la recherche, n’hésitant pas devant l’innovation et l’expérimentation, et bénéficiant par suite effectivement d’un travail d’équipe et d’une autonomie significative. L’hétérogénéité des publics appelle en ce sens une forte responsabilisation d’enseignants mieux formés, dotés d’une réelle liberté de mouvement et d’auto-organisation (et des moyens afférents !), et l’introduction donc d’une certaine souplesse dans la gestion d’un système éducatif en mesure de s’adapter à cette hétérogénéité.

Les difficultés à surmonter différent essentiellement en fonction d’une part des savoirs disciplinaires à transmettre et d’autre part du milieu social des élèves. Le contexte dans lequel elles se posent déborde donc, sous ces deux aspects, le cadre de l’établissement. En réalité elles sont tout à fait du même ordre dans tout l’espace national : la logique des maths et les problèmes que suscite son appropriation sont les mêmes à Valenciennes et à Perpignan ; et comme le montre la recherche, les difficultés de maîtrise de la langue écrite par les élèves dépendent fondamentalement de l’éducation familiale : ce sont les mêmes, pour les milieux défavorisés, à Brest et à Nice. Loin d’enclore les établissements dans leur rencontre avec un public supposé unique, la gestion d’un système éducatif qui souhaite transmettre la même culture à tous doit donc avoir pour priorité d’assurer un haut niveau de formation initiale et continue des enseignants, de favoriser les échanges entre ces derniers et avec les chercheurs, de stimuler la circulation de la réflexion didactique et pédagogique au sein d’un même cadre disciplinaire, d’impulser la diffusion des innovations efficaces au plan national, de répartir ses moyens financiers et humains entre les établissements au prorata inverse du niveau socio-culturel de leur public. Autant dire que la transmission d’une culture commune a besoin d’un service public de l’éducation nationale qui favorise la coopération et bannit la concurrence en son sein. Un tel objectif appelle certes une large autonomie enseignante, et donc une transformation très sensible du service public. Mais il n’impose en rien, bien au contraire, l’autonomie juridique et financière des établissements !

Conclusion

La comparaison des trois modèles d’école alternatifs à l’organisation actuelle amène les auteurs du rapport de France Stratégie, écrivent-ils, « à deux conclusions » principales (p. 16).

Besoin de marché ou injonction de marchandisation ?

La première consiste à suspendre le dépassement des limites du système existant à la dévolution inéluctable d’« une autonomie forte aux équipes pédagogiques et aux établissements sur les plans juridique, financier et pédagogique ». Comme on vient de le voir, l’autonomie enseignante est une chose, celle des établissements en est une autre, bien différente [11]. Comment peut-on mettre en cause les ravages exercés aujourd’hui par l’organisation de la concurrence entre élèves et la réintroduire innocemment dans les rapports entre établissements ? Dans cette insistance sans réelle justification sur la nécessité de systématiser la concurrence entre les établissements, et d’abandonner dès lors la régulation du système éducatif au marché, il est difficile de voir autre chose qu’un a priori idéologique et la reprise, en habits neufs, de l’antienne multiséculaire selon laquelle sans concurrence, point de salut.

Culture commune, formation professionnelle, accomplissement personnel : concilier les finalités ?

La seconde conclusion du rapport appelle à réfléchir sur les modes possibles de conciliation entre les trois finalités alternatives examinées. De fait il paraîtrait difficile de concevoir dans le monde d’aujourd’hui une politique scolaire qui ne se soucie pas de l’un ou l’autre des trois objectifs correspondants.

Si l’on prend au sérieux l’exigence de transmettre une culture commune, objectif prioritaire et consistant, le seul à même de surmonter les limites du système actuel, la question se pose du moment de l’introduction de l’orientation et de la formation professionnelles. Comme le GRDS l’a maintes fois souligné, la transmission d’une culture véritablement commune suppose une conduite des apprentissages beaucoup plus efficace dès l’école primaire ; ce qui ne pourra avoir pour effet qu’un report général par les familles des choix d’orientation à l’entrée dans l’enseignement supérieur. Cette perspective, qui s’autorise des comportements actuellement observés dans tous les milieux sociaux en cas d’entrée réussie dans la culture écrite, converge tant avec les exigences d’un exercice de plus en plus complexe de la grande masse des métiers, a fortiori dans un avenir de proche et moyen terme, qu’avec les besoins de la gestion démocratique, nécessairement instruite, de nos sociétés de demain. Il paraît donc très raisonnable de repousser le moment des orientations existentielles au terme d’un tronc commun couvrant l’actuel cursus secondaire : la culture acquise au long de ce tronc commun ouvrant à toute possibilité de choix disciplinaire et professionnel, et comportant donc des composantes négligées aujourd’hui, en matière par exemple d’enseignement technologique.

Nous avons suffisamment souligné, par ailleurs, combien la condition première de l’accomplissement personnel des élèves résidait dans la réussite des apprentissages scolaires, dès lors que ces derniers pouvaient être considérés comme indispensables à une participation libre, active et responsable de chacun à la vie sociale. Mais cette condition n’est pas exclusive. L’on peut encore considérer qu’au-delà donc d’une détermination pertinente des contenus de la culture commune et d’une conduite efficace de leur transmission, la possibilité offerte à chacun de développer spécifiquement des capacités intellectuelles, artistiques, sportives outrepassant les réquisits de la culture commune doit être une préoccupation du service public d’une éducation nationale légitimement préoccupée de « l’accomplissement personnel » de ses élèves.


[2Voir Jean-Pierre Terrail, Les enjeux cachés de l’« interdisciplinarité » au collège, 2015, http://www.democratisation-scolaire.fr/spip.php?article213.

[3Chercheurs et politiques s’en tenant essentiellement à la dénonciation (ou à la promotion) de la concurrence entre les établissements, qui n’est jamais qu’une modalité de la mise en concurrence des élèves et des classes sociales.

[4Dans l’avant-propos du rapport, Jean Pisani-Ferry le suggère ainsi : « Une telle démarche pourrait être engagée à propos d’autres institutions qui jouent, comme l’École, un rôle central dans le pacte républicain – par exemple la police ou l’assurance-maladie » (p. 5).

[5L’argument récurrent des effets supposés ravageurs du passage d’un maître à plusieurs enseignants lors de l’accès au collège n’a qu’une portée limitée : d’après les études du ministère lui-même, les échecs dans le secondaire sont d’abord et massivement associés à la médiocrité des apprentissages réalisés à l’école élémentaire… Quant au ratage de ces derniers, il a beaucoup à voir avec la conviction déficitariste qui sous-tend les conceptions pédagogiques à l’œuvre depuis les années 1960/70.

[6Max Weber, Essais sur la théorie de la science, Paris, Pocket, [1904-1917], 1992, p. 181.

[7Selon un sondage Harris réalisé en 2016 pour le SNUIPP, 59% des maîtres (contre 50% en 2013) privilégient l’épanouissement plutôt que la transmission des connaissances, voir : http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2016/11/08112016Article636141858241488638

[8Jean-Pierre Astolfi, La Saveur des savoirs, ESF, Issy-les-Moulineaux, 2008 (p. 68).

[9Voir notamment Bernard Charlot, Élisabeth Bautier, Jean-Yves Rochex, École et savoir dans les banlieues et ailleurs, Armand Colin, Paris, 1992.

[10Voir Jean-Pierre Terrail, Pour une école de l’exigence intellectuelle. Changer de paradigme pédagogique, La Dispute, Paris, 2016.

[11Rappelons à cet égard que jusqu’aux années 1980-90 la réalité de l’autonomie des enseignants universitaires et leur capacité d’auto-organisation pédagogique au sein des disciplines n’impliquait en rien l’autonomie juridique et financière des universités.