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Apprendre à lire : l’enjeu de la syllabique, de Janine Reichstadt

Éditions L’Harmattan, 2011, 148 pages, 14,50 euros.

vendredi 3 juin 2011, par Colette Hochstetter

Apprendre à lire, entre sens et méthode

Trop d’élèves ne savent pas bien lire : cela compromet leur réussite scolaire dans le primaire et au-delà. Cette situation ne pouvant plus durer tant ses effets sont préoccupants et douloureux pour les élèves et les parents ainsi que pour les enseignants qui ne peuvent s’en satisfaire, l’auteure nous invite à comprendre ce qui, dans les dispositifs d’enseignement, contrarie cet apprentissage.

Lire «  parapluie  » à la place de «  parallèle  », «  poisson  » à la place de «  sardine  », ou bien chercher à identifier un mot à partir du contexte ou des images sont autant de situations parmi beaucoup d’autres qui traduisent un échec. La lecture ne peut souffrir l’hésitation, la confusion dans le déchiffrage, caractéristiques des effets de la reconnaissance globale des mots, de la devinette, de la quête de sens en dehors de la lettre des textes scrupuleusement lue.

Ce livre montre alors pourquoi le savoir-lire passe par la maîtrise d’un déchiffrage habile, délié et précis, rendu possible par la mise en œuvre de la syllabique. C’est la seule démarche qui s’inscrit dans l’étude systématique de toutes les clés du déchiffrage dont les élèves ont besoin pour pouvoir lire précisément tout ce qu’ils ont sous les yeux dans chacune des leçons étudiées dans une progression rigoureuse.

On a voulu réduire la syllabique à l’inculcation d’automatismes détournée du souci de la compréhension et du sens culturel de la lecture. L’auteure montre pourquoi il n’en est rien, en développant les raisons pour lesquelles il n’est pas possible de séparer la compréhension et le déchiffrage, qui en est la voie d’accès absolument incontournable : seule la lecture précise des mots, de la ponctuation, et de tout ce qui organise l’écrit, permet au lecteur de savoir ce qu’il comprend ou pas d’un texte. Face à des pratiques qui travaillent le sens avant même que les élèves aient pu s’en faire une idée en lisant par eux-mêmes, l’auteure propose d’autres pistes de travail pour construire d’autres rapports au sens.

Contrairement à ce qu’on a pu dire pour la discréditer, ce n’est pas la syllabique qui induit la pauvreté de certains textes de manuels. L’étude progressive des graphèmes oblige à sélectionner les mots permis dans chaque leçon, mais ces mots sont très vite très nombreux, aussi la syllabique peut parfaitement se conjuguer avec la volonté d’offrir tôt aux apprentis lecteurs un vocabulaire et des textes ambitieux, en mesure de satisfaire leur intelligence déjà affirmée.

Loin de toute polémique, ce livre parvient à nourrir efficacement la nécessaire réflexion de cette question si lourde d’enjeux, notamment pour les élèves d’origine populaire, qu’est l’apprentissage de la lecture.


Voir en ligne : Recension parue dans L’Humanité